Encore quelques longues semaines mais pour vous faire patienter…
Debby Dandridge se glissa dans les draps du lit avec une certaine appréhension. C’était la première fois qu’elle passait une nuit dans une maison magique. Sa dernière expérience remontait à plus d’un an à Brooklyn, quand elle et son mari avaient été invités par les Dolce à dîner chez eux. Les murs qui se rétractaient suivant la présence des magiciens lui revinrent soudainement en mémoire, ce qui n’était pas de nature à la rassurer. Elle se remémora aussi la transformation du Bus en véritable camion routier. Les matières naturelles que cette famille utilisait semblaient vivantes, du moins quand ils s’en approchaient. Elle jeta un œil au plafond pour vérifier qu’il n’était pas en train de descendre. Bob se lavait les dents dans la petite salle de bain attenante, quand en tournant le robinet pour se rincer il ne se passa strictement rien. Aucune eau n’en coulait, pas même un petit filet, pas la moindre goutte.
– Abado. La bouche pleine de dentifrice rendait son articulation compliquée, Il dut s’y reprendre à deux fois avant que sa femme ne comprenne.
– Y a pas d’eau !
– Ca ne m’étonne pas, ils n’ont pas besoin de boire.
– Mais ils ne se lavent jamais ? La question interpella la mère de David qui passa en revue tous les souvenirs qu’elle avait avec Mélidiane. Toujours élégante, à la tenue soigneusement élaborée, elle dégageait un subtil parfum sucré qui faisait hésiter entre Chanel et Guerlain.
– Ils sont propres c’est certain, comment, je n’en sais rien…Répondit-elle en touchant de la main le mur qui dominait sa tête de lit.
– Qu’est ce que tu fait ? Dans l’encadrement de la porte de la salle de bain, Bob l’observait sans vraiment comprendre ce qu’elle fabriquait à poser ses mains sur le bardage en bois.
– Je regarde si c’est vivant.
– Ma pauvre Debby, T’as plus de réseau. On est dans une maison au fond des bois, je ne vois pas ce qui t’inquiète ! A ces mots la salle de bain se rétracta, éjectant brusquement le père de David à l’intérieur de la chambre, vers le vieux fauteuil club en cuir, qui se décala d’un bon mètre pour que le mari de Debby ne chute pas directement sur le parquet. Une fois « assis », il entendit distinctement le fauteuil souffler, visiblement épuisé par un tel mouvement. Elle se recoucha immédiatement, d’un seul geste, totalement effrayée par ce qui venait de se passer, ne laissant dépasser de l’épaisse couverture en fourrure blanche que sa tête aux yeux exorbités.
– On va finir broyés !
– Tu exagères toujours. Dit-il le verbe tremblant, repliant ses jambes sur le fauteuil tout en regardant autour de lui.
– Alors viens te coucher ! Le ton était sans appel, Bob n’avait d’autre choix que de rejoindre sa moitié. Le mètre cinquante qui le séparait de la couche lui sembla soudainement démesuré. Il se mit a jauger la distance tel un sauteur en hauteur en pleine finale des jeux Olympiques. Mu par le poids d’une société définitivement machiste, qui définissait l’homme comme courageux et robuste, il se leva prudemment. A chaque pas, le mur qui se trouvait derrière le vieux club dont il venait de s’extirper se rapprochait d’autant. A chaque fois que Bob s’arrêtait, il cessait à son tour tout mouvement… Si bien qu’une fois allongé, les quatre murs, porte comprise, entouraient totalement le lit, encadrant la couche au centimètre près.
– Faut pas être claustrophobe. Debby parlait sous la couverture comme si cette dernière pouvait la protéger. Elle ressentait ce sentiment tout droit sorti de l’enfance où aucun monstre ne pouvait l’attaquer tant qu’elle ne dépassait pas des draps. Le plafond se trouvait à une dizaine de centimètres à peine de leur tête.
– Tu vois, plus la peine d’aller en Egypte on sais ce que ça fait d’être dans un sarcophage. Bob soucieux de détendre l’atmosphère, ne fit qu’agacer encore davantage sa femme.
– Tais toi et prend moi dans tes bras ! Bob accueillit la nouvelle avec un large sourire au dentifrice résiduel.
– Commence à me plaire cette maison finalement… Le mari de Debby stoppa net sa respiration quand il vit la couverture en fourrure d’ours blanc se gonfler et la tête du prédateur se tourner vers eux.
– Good night. Le silence de mort qui suivit la phrase prononcée par l’impressionnante mâchoire du carnivore les glaça d’effroi. Bouches bée, ils n’osaient plus bouger le moindre doigt de pied, qui devait se trouver à une vingtaine de centimètres à peine du premier croc.
– Ca parle anglais les ours ? Murmura Bob en bougeant à peine les lèvres.
– On va finir dévorés ! Susurra t’elle avec terreur.
– Dort.
– N’y compte pas une seconde !
Bob se tourna sur le côté comme il avait l’habitude de le faire pour dormir. Sa tête se retrouva pratiquement collée au mur. Ce dernier s’écarta de deux ou trois centimètres pour laisser le mari respirer tranquillement. Debby vint se scotcher à lui dans la seconde, rétractant ses jambes avec précaution pour les enfiler entre celle de son mari. Bob élargit son sourire… Cela faisait des années qu’elle ne s’était pas agrippée de cette manière. Il se sentit beaucoup mieux d’un seul coup. S’ils avaient du être dévorés, cela serait déjà arrivé, il en était maintenant certain. Cette demeure respirait l’accueil, il n’était pas question qu’elle se transforme en cauchemar une fois la nuit tombée. Il se tourna vers sa femme qui fermait les yeux en attendant d’être engloutit vivante.
– J’ai la vague impression qu’il a un accent Irlandais.
– Scottish. Rectifia l’ours polaire.
– Merci. Bob était rassuré, cette question de tonalité l’aurait probablement empêché de dormir. Il ignorait qu’il y eut de tels prédateurs au nord de l’Ecosse, mais du coup, s’endormirait un peu moins ignorant.
– Je te préviens tout de suite Bob, si tu fermes l’œil, je divorce dans l’heure.
– Il n’y a pas un avocat à moins d’une heure d’ici chéri.
–Tu trouves ça normal de parler à une peau de bête ?! L’Ours cette fois grogna légèrement ce qui fit presque hurler Debby.
– Cela fait quelques jours que nous ne faisons plus grand chose de normal mon amour. Terrifiée, elle ne répondit même pas. Pétrifiée, en position fœtale, elle s’attendait maintenant à succomber aux pires souffrances. Mais après une minute entière passée à trembler, rien n’arriva. Sans bouger d’un poil, elle reprit la parole.
– Il est parti ?
– Pourquoi tu ne lui demandes pas directement ?
– Ma mère m’avait conseillé de ne pas épouser un Anglais, j’aurai du l’écouter !
– Je suis toujours là. La voix calme mais caverneuse du prédateur glaça la mère de David. – Sans moi vous mourrez de froid, il n’y a pas de chauffage dans la maison.
Mourir pour mourir, de toute manière… non… Je refuse d’admettre que je parle à une descente de lit !
Wow ! J’aurais pas dû lire, ça me donne beaucoup trop envie de lire la suite !
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ha ha ha…
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